Prostitution, proxénétisme, michetonnage, « nudes », escorting, caves… font partie du paysage de bon nombre de jeunes que nous accompagnons. Si ces pratiques ont toujours concerné l’une ou l’autre de ces jeunes, nous avons le sentiment que depuis quelques temps, elles se généralisent et surtout se banalisent.
Ce sujet est difficile à aborder avec elles. L’évocation de la prostitution, ou autres pratiques apparentées, est péjorative et suscite une levée de bouclier : « Moi, jamais, vous croyez quoi ? », « Jamais je ferai ça moi ». Elles donnent plus facilement des informations sur les unes, les autres, ou celles qui « le font » et/ou « organisent des plans ».
Que faire de ces récits qui se disent sans se dire ou à demi-mot, qui s’esquissent à peine ou qui se dissimulent déjà ? Comment entendre malgré tout, sans banaliser à notre tour, ce qui semble ne poser « aucun souci » ?
Que faire de nos propres projections et représentations quand les « coordonnées classiques » du corps, de l'effraction, du trauma, du viol ou de l'abus semblent s'absenter des dires et/ou des vécus ?
Comment laisser la parole se déployer, tout en faisant exister le cadre juridique dans lequel sont prises ces pratiques, qui fait d’elles des victimes à protéger?
Intervenir ? Jusqu’où ? Comment ?
Enfin, comment entendre ce qui se joue là, pour ces jeunes souvent repérées comme vulnérables et facilement « harponnables » ? Dans un contexte marqué par l’usage massif des réseaux sociaux, quel sens donner à ces pratiques ? Comment viennent-elles peut-être aussi entrer en résonance avec leur propre histoire ?
Sonia Weber exerce la psychanalyse à Strasbourg et dirige l’association Visa-Vie -de la Violence Individuelle Subie et/ou Agie à la Vie, qui propose des accompagnements pour les mineurs relevant de l'Aide Sociale à l'Enfance.